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La mère Casimir.

Tout comme Bibi la Purée, la mère Casimir de son vrai nom Marie-Joséphine Emonet fréquentait le Quartier Latin. En témoigne ces quelques lignes tiré de « L’Intermédiaire des chercheurs et curieux » du 15 Juillet 1900 quelques jours après son décès: « Une vieille femme vient de mourir, célèbre au Quartier Latin, sous le nom de la mère Casimir : c’était une ancienne danseuse dont la mère se flattait d’avoir été distinguée par Charles X à ce qu’assurait du moins sa fille. Les étudiants affectionnaient cette étrange vieille, qui vivait de leurs libéralités. Elle a paru, en effigie, dans une pièce de circonstance, écrite par eux; elle a fait également partie d’une cavalcade, comme personnage légendaire. » ou bien encore ce portrait de la Mère Casimir. tiré de l’Almanach du journal « L’Étudiant: écho du Quartier Latin » 1895 : « Nature hybride, anti-sexuelle, avec une poitrine désespérément plate, telle est la mère Casimir. Petite vieille à la voix aigrelette, à la figure sinuesque et ratatinée, que l’on voit tous les soirs aux abords des terrasses des cafés du boul’Mich avec un panier au bras, dansant une gigue quelconque… »

La mère Casimir.
Carte postale de la mère Casimir.

Tu la reconnaitras toi, qui fréquentait le Boul’Mich. ( Boulevard Saint-Michel ) Pouvons-nous lire sur cette carte postale du 30 juillet 1900 a destination de Sydney. Quelle renommée.

Mais c’est surtout dans la rubrique fait divers du Journal Le Temps du 07 Juillet 1900 paru le jour suivant sa mort que nous en apprendrons le plus ce ce petit bout de dame:

La mère Casimir est morte. Il convient de faire part de cette disparition aux générations d’étudiants qui ont passé, depuis de longues années, par le quartier latin. Ce n est pas à elles qu’il faut rappeler la figure falote, et stupide un peu, de cette petite vieille, sa tête en tout temps nue, ses longs cheveux blancs épandus en liberté sur ses épaules voûtées, et son accoutrement sommaire et minable. A ceux qui n’ont point connu la mère Casimir, présentons-la: c’était une des notabilités du quartier latin. La célébrité, aujourd’hui, a pour consécration la chansonnette et la carte-postale illustrée. La mère Casimir a sa carte-postale, où s’étale sa photographie en pied, et dont elle-même faisait la réclame. Et elle a sa chanson. Ce sont des triolets:

Elle trotte menu, menu,
On dirait la fée Carabosse
Avec son corps tout biscornu,
Elle trotte menu, menu,
Branlant sur un cou peu charnu
Sa vieillotte tête de gosse,
Elle trotte menu, menu,
On dirait la fée Carabosse.

 

Comment la mère Casimir conquit-elle cette célébrité enviable? Il y avait d’abord sur elle une légende. Volontiers, la petite vieille affirmait que pour sa mère Charles Dix eut un regard de complaisance. Elle racontait aussi qu’elle avait eu, au temps jadis, de grands succès comme danseuse. Mais qu’elle eût été premier sujet dans un grand théâtre, on n’en avait pour preuve que sa parole, parfois avinée. Cependant, malgré la vieillesse, elle avait conservé des jambes agiles. Toutes les nuits, devant les cafés, elle allait, venait d’une table à l’autre, les bras en « ailes de zéphyr », pour deux sous, en faisant des « grâces ». Même, c’était là son gagne-pain le plus sûr, et, en tout cas, le seul avéré. Mais ce n’étaient ni ses danses, ni ses légendes qui avaient rendu la mère Casimir célèbre entre le bal Bullier et le Pont-au-Change. Elle était connue, surtout parce que, dans ce quartier latin où tout passe si vite, où les étudiants les plus fous se transforment tôt en notaires ou en juges de paix, et où les filles meurent si jeune, la mère Casimir ne passait pas. A chaque retour des vacances, elle était là, toujours, et les vieux étudiants la présentaient aux nouveaux venus. La mère Casimir et son rival, Bibi la Purée, tenaient au sol de la montagne Sainte-Geneviève aussi solidement que le Panthéon. Il y avait cinquante ans qu’elle dansait et buvait aux terrasses du boulevard Saint-Michel, lorsque la mort, qui déracine tout, l’a fait disparaître brusquement. A côté de la petite vieille qui riait pour deux sous, il avait une pauvre femme, un peu folle et très malheureuse. Maintenant qu’elle est morte, on peut parler de sa vie privée.

 

La mère Casimir s’appelait Marie-Joséphine Emonet. Elle était née à Pans « près de Pantin », il y a fort longtemps de cela le 22 mars 1827. Officiellement, elle était marchande de fleurs; c’est sous cette qualité qu’elle était inscrite au bureau de bienfaisance du 5e arrondissement. Elle avouait un gain quotidien de 50 à 75 centimes; elle touchait du bureau 10 francs par mois. C’était peu, car la petite vieille buvait beaucoup. Mais ce qui empoisonna son existence, ces dernières années, ce furent ses rapports avec Bibi la Purée. Ce dernier personnage, Visage osseux et grimaçant, le nez pointu, menton en galoche, avec orgueil se prélassant dans un complet qui s’effiloche, fut, assure-t-il, l’un des familiers du poète Paul Verlaine. C’est lui qui cirait ses souliers. Verlaine mort, il se mit à exploiter la mère Casimir. Les deux vieux vivaient ensemble, en se détestant, dans un garni infâme de la rue de la Parcheminerie; entre leurs mains, chaque mois, les dix francs du bureau de bienfaisance fondaient comme neige au soleil. Cette association dura un an ou deux, jusqu’au matin où la mère Casimir mit à la porte Bibi la Purée. Leur brouille fit les délices du quartier latin. On s’amusait à amener entre eux des rencontres continuelles; et les scènes de ce ménage invraisemblable étaient d’une folle gaieté. Pour se consoler, la mère Casimir but davantage, de plus en plus, jusqu’à ce qu’on la couchât, à l’hôpital de la Pitié, dans un lit blanc; elle n’y fit que passer, elle fut portée peu d’heures après dans une fosse commune. Il y a peu de temps, la mère Casimir avait eu une heure de triomphe. Au dernier cortège de la ml-carême, elle avait figure, mise à côté de son ennemi inséparable, Bibi la Purée, sur le plus beau char du quartier latin.

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